Echos de l'assemblée générale de juin 2017Août 2017 L’Assemblée
générale de La Cimade, réunie le 24 juin 2017, a
été profondément choquée par les propos de
déni et de mépris à l’égard de
l’action des associations tenus par le ministre de
l’intérieur Gérard Collomb à Calais le 23
juin. En leur demandant « d’aller déployer leur
savoir-faire ailleurs », il provoque l’indignation des
acteurs de la solidarité pour qui le devoir
d’humanité impose d’être
précisément là où des êtres humains
sont en souffrance.
Ci-dessous le texte de la motion adoptée par l’Assemblée générale de La Cimade du 24 juin 2017 « Les membres de l’Assemblée générale de La Cimade tiennent à exprimer leur forte inquiétude face aux signaux et aux premières actions de politiques publiques concernant les questions migratoires. Le premier de ces signes a été de confier, une fois de plus, la totalité de la politique migratoire au seul ministère de l’intérieur, privilégiant une vision sécuritaire de la question. Ce choix réitéré d’une concentration des prérogatives au détriment d’une approche résolument interministérielle accrédite malheureusement, à nouveau, la perception selon laquelle l’immigration représenterait un problème ou une menace. Avec, de plus, la poursuite d’une opposition sans nuance et loin de la réalité complexe des exils actuels, entre personnes réfugiées et personnes migrantes. Nous nous alarmons des violations d’une ampleur inédite des droits les plus élémentaires des personnes migrantes dans le Calaisis et Dunkerquois, à la frontière franco-italienne, ou dans le nord de Paris. Traque permanente, gazages, confiscations de biens, entraves diverses pour l’accès à l’eau, à la nourriture ou aux soins, privations illégales de liberté, refoulements illégaux, etc., et répression des citoyens solidaires. Face aux situations humainement inacceptables dans lesquelles se trouvent des milliers d’exilés en France, le gouvernement semble persévérer dans un déni de réalité. Il n’a pris à ce jour que des mesures répressives et poursuivi des pratiques administratives et policières indignes et inacceptables. Pire, il les a même défendues devant les tribunaux saisis en urgence, et il continue à harceler et menacer les citoyens et associations solidaires des personnes étrangères. Alors que la France, dans un passé récent, a déjà été condamnée à cinq reprises par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour des pratiques jugées inhumaines et dégradantes d’enfermement en rétention de familles avec enfants en bas âge, les nouvelles autorités françaises ont poursuivi ces pratiques en maintenant en centre de rétention pendant 14 jours une famille avec un enfant âgé de deux ans et demi. En contradiction avec le discours du Président de la République à Bruxelles, les politiques publiques en France continuent de s’inscrire dans la logique répressive des politiques migratoires de l’Union européenne sur son territoire, à ses frontières et en amont. Tout cela amène La Cimade à lancer un cri d’alarme. Elle réclame en urgence du Président de la République des orientations claires, des mesures et des moyens nouveaux pour une politique migratoire d’hospitalité, fondée sur le respect de la dignité et des droits fondamentaux des personnes étrangères, à la hauteur des enjeux qui se posent à la France et à l’Europe aujourd’hui. Ils sont attendus par les personnes réfugiées et migrantes qui font partie de cette France plurielle qui s’invente à chaque génération. Ils sont attendus par les acteurs de la société civile qui s’engagent dans la construction d’une société plus solidaire qui n’oppose pas les uns aux autres mais favorise la cohésion sociale et le « bien vivre ensemble ». Ils sont attendus par la communauté internationale d’un pays qui revendique son rôle pionnier, à la pointe de la défense et la promotion des droits humains. » L’assemblée générale s’est aussi prononcée sur les contrôles à la frontière franco-italienne. À Vintimille, en Italie, comme dans la vallée de la Roya, en France, de nouveaux lieux de blocages et de refoulements pour les personnes exilées se développent. Alors que la France a rétabli les contrôles à ses frontières intérieures dans le cadre de l’état d’urgence, les pratiques en dehors de tout cadre légal se multiplient pour bloquer les migrants. C’est pourquoi le vœu (texte ci-dessous) présenté conjointement par les régions Sud-Est et Auvergne-Rhône-Alpes a été voté. « Depuis la fermeture des frontières et la mise en place de l’état d’urgence en 2015, la situation de la zone frontalière franco-italienne empire. Nous sommes témoins de l'afflux chaque semaine de centaines d’exilés passant par la vallée de la Roya, qui ne sont accueillis que grâce à la bonne volonté de certains habitants ; les difficultés sont multiples : trajet de la vallée de la Roya à Nice (il faut payer le train ou marcher 3 jours), pré- enregistrement à la PADA engorgée, accueil à la Préfecture sur-saturé, avec des délais très variables et surtout, absence totale d'hébergement ou de la moindre aide par les services de l’Etat. C'est la rue et la chasse par la Police alors même qu’il n'y a à Nice ni CAO, ni centre d'hébergement temporaire d'urgence. Compte tenu de ces circonstances, beaucoup partent avec en poche la convocation à la préfecture remise par Forum Réfugies, vers une autre préfecture ou vers d'autres pays. De plus, la plupart relève de la procédure Dublin. La situation des mineurs est particulièrement préoccupante et révoltante ; ils ne bénéficient pas de la protection à laquelle ils ont droit et « disparaissent » aussi bien souvent. Cinq associations, dont la Cimade, se sont saisis du problème sur le plan national, pour appuyer le travail des associations sur le terrain, établir un diagnostic et envisager ensemble des solutions : appui par le financement d’un coordonnateur, pressions pour la mise en place d’un centre de répit, soutiens aux actions contentieuses, formation des acteurs engagés… Nous savons que cet état de fait ne concerne pas que les Alpes Maritimes : Calais, Paris, le Pays de Gex dans une moindre mesure ou même le Briançonnais connaissent cette même réalité d’hommes et des femmes épuisés dont les droits les plus élémentaires ne sont pas respectés. A rebours de cette situation emblématique des défauts de notre politique de non-hospitalité, nous défendons la libre circulation des exilés, l´accueil et la protection immédiate des mineurs en conformité avec la loi et nous dénonçons les exactions de tout ordre commises contre les exilés. La Cimade continuera à témoigner de cette situation insupportable, qui bafoue les droits les plus élémentaires des personnes et continuera à être aux côtés des « délinquants solidaires », quels que soient les risques, pour plus d’humanité et de solidarité. L’Assemblée Générale de La Cimade, réunie à Paris le 24 juin 2017, dûment informée de la situation inacceptable au regard de leurs droits, faite aux migrants qui arrivent dans le sud-est de la France, décide d’y amplifier nettement l´action de la Cimade en manifestant beaucoup plus encore sa solidarité active. Elle demande au Conseil national et à la Direction : - d’intensifier les négociations entre les associations partenaires et avec les pouvoirs publics pour mettre en place une action coordonnée efficace et obtenir, en particulier, la libre circulation des migrants et les capacités d´accueil indispensables pour le dépôt et le traitement efficace des demandes - de dégager des moyens, matériels et humains pour soutenir les diverses actions de solidarité, en cours et à créer. - de poursuivre et d’amplifier le plaidoyer et les demandes, en direction des décideurs publics, afin que les droits et la dignité élémentaire des personnes migrantes, et particulièrement ceux des mineurs, soient respectés. » En écho à ce vœu, La Cimade renforce sa présence dans cette région avec notamment l'ouverture d’un poste de coordinateur/coordinatrice des mobilisations à la frontière franco-italienne prévue à partir d’octobre 2017 à Nice. Celui-ci sera porté en inter associatif par La Cimade, le Secours Catholique, Médecins du Monde, Médecins Sans Frontières et Amnesty International (portage administratif du poste par La Cimade). Enfin, l’Assemblée générale du 24 juin a élu un conseil national composé de 19 membres issus des différents collèges. Trois régions n’ont pas élu de membres, mais leurs bureaux régionaux recevront les documents et compte rendus, afin d’associer au mieux le travail du conseil national et la vie du mouvement dans l’ensemble des régions. Le conseil national a élu le 3 juillet un bureau national composé, comme dans la période précédente, de 7 membres (4 élus régionaux et 3 titulaires). Geneviève Jacques, présidente Denys Hammel, trésorier Jean-Charles Tenreiro, vice-président Marion Rouillard, secrétaire Anne Daussy Gaston Debard Geneviève Domenach-Chich |