Les
Etats Généraux des migrations ont été
lancés en novembre dernier par une société civile
désireuse d’unir ses forces en faveur d’une autre
politique migratoire. Depuis, dans chaque région, des collectifs
s’organisent pour élaborer leur contribution. Exemples
à Marseille et à Lille, où La Cimade participe
activement à l’élaboration du projet.
Depuis leur lancement en novembre (voir le communiqué de presse), les Etats Généraux des Migrations (EGM) s’organisent.
D’une part, au niveau local, des collectifs se réunissent
et organisent des concertations décentralisées partout en
France, permettant la mise en commun de questionnements, pratiques et
propositions concrètes et alternatives sur les enjeux des
migrations et des politiques migratoires. En parallèle, les EGM
fédèrent également des initiatives et
évènements, préexistants ou mis en place pour
l’occasion, notamment des actions d’interpellation et de
mobilisation citoyenne en réaction au projet de loi. Le site web des Etats Généraux propose un calendrier de ces manifestations.
D’autre part, un évènement national, qui aura lieu
les 26 et 27 mai 2018, est en préparation. Ce rendez-vous
permettra de rendre compte des travaux et réflexions des groupes
locaux et dégager des leviers d’actions pour une politique
alternative à celle qui est proposée aujourd’hui
par le gouvernement.
Au niveau national, La Cimade est impliquée dans différents espaces de coordination :
- Le comité de pilotage national (qui rassemble à la fois des associations nationales et locales)
- Un sous-groupe de travail consacré aux actions
possibles au sujet du projet de loi, les EGM ayant une volonté
de pouvoir réagir à l’actualité du moment
- Un groupe de suivi des consultations territoriales.
Au niveau local, La Cimade est également très investie
dans de nombreuses régions ou villes, notamment Caen, Rouen,
Nord-Picardie, Languedoc, Nîmes, Drôme-Ardèche,
Bourg-en-Bresse, Saint-Etienne, Lyon, Strasbourg, Marseille, Toulouse,
Blois, Poitiers…
A Marseille et dans le Nord, des cimadiens nous racontent comment les EGM se déclinent sur leur territoire.

A Marseille, la mobilisation d’acteurs associatifs variés
Jacques Blanc, équipier en région Sud-Est, est aux
premières loges de la mobilisation marseillaise. Une
réunion inter associative s’est tenue le 26 janvier, dans
le local de La Cimade, réussissant le pari de réunir des
associations et acteurs de tous horizons.
« Nous avons lancé une
invitation assez large, en ciblant tous les signataires de
l’appel. L’invitation a circulé et d’autres
personnes se sont jointes aussi, nous étions une quarantaine en
tout » raconte Jacques. « Parmi
les présents, au-delà de nos partenaires habituels, il y
avait beaucoup de structures travaillant sur les questions de
santé – ce qui montre à quel point elles se sentent
concernées par les questions migratoires… Il y avait
aussi un représentant de la CGT, et c’était
intéressant d’avoir un regard sur le monde du travail,
qu’on n’appréhende pas forcément beaucoup
d’habitude. »
Au cœur de cette réunion, une question : celle de faire un
travail collectif sur Marseille, afin de faire remonter aux EGM une
unique contribution marseillaise. Cette approche est validée par
les participants.
« Un petit groupe de rédacteurs s’est alors formé pour travailler sur un document unique » explique Jacques. « L’idée
est de présenter une première mouture pour la prochaine
réunion du collectif, le 23 février, et d’aboutir
à un document finalisé pour fin mars. »
Mais pas question de déconnecter ce travail des autres
initiatives et lieux d’échanges existants à
Marseille : « Nous reprenons
les réflexions dans différents lieux, pour y associer le
plus de monde possible. Par exemple, nous avons sollicité nos
groupes d’alphabétisation, pour que les personnes
migrantes puissent contribuer à nos propositions. A La Cimade,
nous organisons une réunion au sein du groupe local de Marseille
pour alimenter la réflexion. Nous profitons aussi des EGM pour
mettre en perspective des initiatives déjà en cours : par
exemple, un observatoire de l’asile qui mobilise l’inter
associatif marseillais depuis plusieurs mois. Et à
l’inverse, nous saisissons toutes les occasions pour parler des
EGM en dehors de nos cercles, lors de formations à des
travailleurs sociaux par exemple. »
Ainsi, les EGM favorisent une fédération d’acteurs
et d’initiatives diverses, autour d’un objectif : aboutir
à une contribution collective autour de points forts qui
caractérisent le territoire de Marseille.
Dans le Nord Pas de Calais, une dynamique enthousiasmante
Dans le Nord, la dynamique des EGM s’est créée
à un niveau plus régional (Nord et Pas de Calais).
« Beaucoup d’organisations, dont La Cimade, étaient présentes dans l’organisation nationale
» explique Nicolas Ketelers, président de la région
Nord Picardie. Ainsi la mobilisation régionale a notamment
été portée par Nan Suel, ancienne
présidente de Terre d’Errance, et qui fait partie du
comité de pilotage national.
« Dans la région, nous
avons déjà une grosse pratique de travail en partenariat,
que ce soit sur de l’opérationnel ou sur des actions de
plaidoyer. » note Nicolas. « Les
EGM s’appuient sur cette pratique existante mais en
élargissant le champ des participants. Ils englobent notamment
de toutes petites associations locales, dont la présence est
très intéressante. »
Une réunion de lancement s’est tenue le 11 janvier
à Lille, montée par un petit groupe de pilotage. Elle a
rassemblé une centaine de personnes et permis de rappeler les
principes des EGM, puis de mettre les participants au travail en
ateliers.
« Cette réunion était très dynamique et enthousiasmante » raconte Nicolas. « Il
y avait une quarantaine d’associations
représentées, certaines qu’on connaît
très bien et d’autres pas du tout. La moyenne
d’âge était beaucoup plus basse que dans nos
réunions inter associatives habituelles, ce qui me semble bon
signe ! On voit que beaucoup de gens se sentent interpellés par
ce sujet. Des personnes migrantes étaient présentes
également et c’était une dimension très
importante, car nous tenons à ce que les EGM permettent aux
personnes de s’exprimer en leur nom. Elles ont beaucoup
apporté à la diversité des points de vue
exprimés. »

A l’issue des ateliers, différents champs d’actions ont été définis :
- L’expression de doléances, accompagnées de
propositions et de solutions, notamment sur le plan législatif.
Il s’agit de faire évoluer les règlementations
(Dublin par exemple).
- Des propositions basées sur des expériences
nouvelles, notamment sur le champ de l’hébergement
(projets de maison du migrant, hébergement dans des
familles…) Il s’agit de promouvoir des initiatives
très concrètes.
- Des actions de mobilisation et de sensibilisation, avec le
souci de toucher le grand public, de faire bouger les regards, de
contrer la peur de l’étranger. L’importance de la
dimension culturelle et festive a été
particulièrement soulignée un comme moyen de travailler
sur l’interculturalité et de poser un autre regard sur les
migrations.
A la suite de cette réunion, une conférence de presse a
été organisée le 16 janvier à Calais,
profitant de l’espace médiatique offert par la venue
d’Emmanuel Macron. Pour la suite, le petit groupe de pilotage
initial a lancé un appel pour que d’autres les rejoignent.
« De fait, les associations ayant des salariés et une
capacité d’animation plus importante se retrouvent en
première ligne » note Nicolas. « Mais nous avons une
vigilance pour que chacune trouve sa place. Dans nos prises de parole
publiques, nous devons faire attention à respecter
l’identité et les positions de toutes les associations qui
s’engagent. »
Le respect du calendrier est un enjeu fort pour la suite du projet, car
la fin du mois de mai va arriver très vite : « Nous
voulons avancer tout en restant en cohérence avec le calendrier
national et les échéances législatives. Il faut
à la fois créer une dynamique, lancer des groupes de
travail sur différents sujets, et produire des choses
concrètes, le tout en un temps très limité. Ce
n’est pas évident de tout mener de front ! »
Mais pour Nicolas, ce défi est surtout très motivant : « Ce
lancement avait quelque chose de rafraîchissant.
C’était un vrai plaisir de voir toutes ces personnes si
différentes d’unir et s’engager dans un projet
commun. Ça donne du tonus pour la suite ! »

(Photos : Marie Le Ray)